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Le Siège Vacant

Le Cardinal de Rétobrand agonise. Le Pontife sombre. À Landébrumes, sous l'œil du Poing du Pardon, la succession s'annonce sanglante.

Le vieil homme pousse un râle qui fait sursauter celui qui lui tient le bras. C’est que le malade, allongé sur le lit, cherche désespérément de l’air, et, qu’au lieu de dire quelque chose d’intéressant, le voilà à grogner.

Le père Naudin, confesseur du très vénérable Cardinal de Rétobrand, corrige immédiatement sa pensée bien peu gemelline, se morigénant de sa cruauté. C’est que le haut membre du clergé avait toujours fait preuve de bonté envers lui… comme à peu près envers tout le monde. Voulant toujours qu’on distribue aux pauvres ce qu’on lui servait dans un banquet, ne s’abaissant jamais à la corruption (en venant même aux maison avec un de ses confrères qu’il soupçonnait de collusion avec la couronne), le religieux ne supportait pas de porter des soies et des laines fines, allant jusqu’à donner son manteau à ceux n’ayant qu’une couverture pleine de puces et dormant dans les venelles. Avec l’âge, il devenait d’expliquer ce que faisait l’éminent personnage dans une fine chainse, et fatalement, cela lui valut de contracter une fort mauvaise fièvre, et d’agoniser dans cette pièce froide, obscure puant le suif de chien, car l’occupant du grabat n’aurait pas non plus aimé bénéficier de belles bougies de cire. A part les oublies au miel, on ne connaissait décidément pas de vice au ratichon, ce qui était en train de le perdre.

Le Pontife Roland de Castellame, dans la Sainte-Cité de Mille-Lumières, dans une espèce de coma depuis plus de cinq ans, rejoindrait bientôt le Domaine des Jumeaux. Malgré les prières et les interventions des mires, son corps s’était dégradé de manière irrémédiable, et l’on ne pensait qu’il n’en aurait plus que pour quelques mois, voire semaines. Son décès provoquerait un conclave, et une nouvelle élection… qui se voyait presque déjà remportée par Rétobrand. Malgré un nombre croissant de crapules au sein de l’Eglise, Rétobrand possédait l’amour d’une bonne partie des Mortrasiens, et surtout un tas de secrets très, très compromettants sur ses adversaires. Sa disparition engendrerait des tourments administratifs à n’en plus finir, et ni le culte, ni l’Empire n’avaient besoin de cela. Il allait pourtant falloir s’y plier, et lui trouver un successeur. Or, si le cardinal détenait des favoris, aucun ne paraissait recueillir d'approbation définitive. Il fallait donc en désigner un nouveau, et vite.

Une quinte de toux glaireuse interrompt les pensées de Naudin. Il enterrait un peu vite celui qu’il fustigeait par la pensée, se permettant cela car, après tout, le vieillard n’aurait voulu que de lui pour s’occuper de ses derniers instants. Choix surprenant tant les deux hommes se détestaient. L’on pensait que le prêtre briguait la place du cardinal, mais il n’en était rien : non seulement dépourvu d’ambitions, trop de scandales émaillaient son passé pour qu’il en puisse concourir à quelque processus électoral que ce soit. Déjà les requins, flairant l’odeur du sang, se disputaient les maigres possessions, mais surtout l’influence, du cardinal. Naudin servait l'église avant tout : il allait devoir trouver qui étaient ceux que Rétobrand aurait aimé voir lui succéder, et faire en sorte qu’il n’en reste un… car prendre la place du cardinal pourrait donc fort bien déclencher l’obtention de celle de Pontife. Le peuple y verrait une forme de justice, et nul doute que le vieux renard avait développé un réseau d’espions, apte à éliminer (spirituellement) les indignes empressés de récupérer son anneau, sa crosse et sa mitre.

Une des cardinales, relativement inflexible, pourrait fort bien l’aider dans cette tâche, ne briguant point le siège pontifical de celui qui fut… son amant. Nul doute qu’elle aurait des fonds pour mettre en place un moyen de désignation fort efficace, car autant pour les Pontifes, nombre de documents existaient (et où l’on retrouvait toujours celui qui nous arrangeait, comme par hasard, traînant sous une huche depuis deux ans, ou porté par un mystérieux coup de vent), mais pour les cardinaux, une grande liberté demeurait.

La porte s’ouvre, et une jeune servante sursaute, ne s’attendant pas à trouver quelqu’un de réveillé dans la salle. Naudin lui fait un geste pour qu’elle pose la cruche d'eau que la damelote tient entre ses mains, et la congédie rapidement. Alors qu’elle s'éclipse, un sourire égrillard traverse la face du ministre du culte : lui n’est pas aussi parfait que Rétobrand, loin s’en faut, et il a suivi du regard sans la moindre vergogne la jeune femme qui venait de prendre la porte, lui tournant le dos, entorse au protocole qui l’intéressait beaucoup. Mirant de nouveau l’ami, car c’en est un, allongé sur son grabat, n’aperçoit-il point un coin de lèvre goguenard qui vient de se dessiner sur la face blême ? Pourtant, ses yeux ne se sont pas ouverts, mais ce mentor le connaît si bien…

Venez, une nouvelle fois, décider du destin de Mortras. A la tête d'un monastère, d'une mesnie (ou d'un mélange des deux), faites en sorte que ce soit VOTRE candidat qui soit désigné pour prendre la place d'un cardinal dont la cathèdre vient de se vider... car celui qui s'assoit dans ce siège aura loisir, dans peu de temps, d'occuper celui le plus haut de Mille-Lumières à n'en point douter !

Que vous soyez un novice, un prêtre-guerrier... mais aussi un artisan venu vanter ses merveilles, un aventurier ou un marchand filou en quête de bonnes affaires, vos choix impacteront sur le monde religieux, la morale de l'Empire... et de tout le reste ! Rejoignez un des groupes qui part pour la Commanderie de Landébrumes, qui va accueillir, sous l'œil vigilant du Poing du Pardon, observer vos tribulations, magouilles et négoces, pour faire des Duchés un monde meilleur. Fourbissez vos lames, vos plumes et vos langues, car pour que La Dame et Sire vous touchent de leurs grâces, briller dans nombre de domaines se révèlera indispensable. Honnête ou roué ? Menaçant ou conciliant ? Vif ou avisé ? Comme toujours, ce sera VOTRE choix.